A l’heure où les oiseaux disparaissent, les humains continuent de rêver à leur corps en vol. Serait-il incongru d’envisager une collusion entre ces faits ?

A contre-courant de l’injonction faite d’enfouir le langage quand il se fait brouhaha, il nous a importé d’importuner le somme de tout.e un.e chacun.e, piocher dans le rêve – le nôtre, puis celui d’autrui – quelques bribes de l’expérience du vol. 

L’aptitude au sillon-nage des cieux, au vadrouillage dans la brume, au frôlement des océans, nous ne l’expériençons qu’en rêve, en fantasme, ou à l’aide d’outillages élaborés et machines volantes motorisées. 

Interroger des proches quant à leur rêves de vol nous est alors passé par la tête. 

Ce qui apparaît flagrant est la grande poésie – surprise au dépourvu – habitant le témoignage de nos interrogé.es, à qui il était, sans doute pour la première fois, enjoint de narrer et détailler leur expérience onirique en lévitation, aussi farfelue soit-elle. 

Exhumer cette poésie de l’envol rêvé, ce passage abrupt du sommeil au songe, à la retransmission du souvenir de bouche à oreille d’une expérience intime, pourtant universellement vécue nous semble, non seulement jubilatoire, mais coton. 

Ainsi nous déclinerons les techniques de vol aves les mots et les lignes dessinées que suscite ce voyage, afin d’en proposer une forme en éventail ; éventail de pratiques, de sensations, d’explorations, mais aussi d’invoquer nos modèles ultimes, les oiseaux. 

Notre besoin d’oiseau est à frictionner avec notre besoin d’expérience de l’espacement, d’habitation de l’intervalle, parce que, comme le dit le philosophe Baptiste Morizot, cette expérience visiblement contient une joie.